Christophe Megel, président du Bocuse d'Or à Singapour.

Christophe Megel, président du Bocuse d’Or à Singapour. ©Christophe Megel

A deux mois de la prestigieuse compétition culinaire du Bocuse d’Or qui se déroule à Lyon les 27 et 28 janvier prochains, Christophe Megel conseille et encourage le candidat singapourien, Yew Eng Tong, actuellement chef du restaurant du Resorts World Sentosa, Ocean.

Car depuis 2002, le Français est en effet le président du comité local du Bocuse d’Or et prend son rôle très à cœur. « En dix ans et cinq participations, Singapour a remporté une médaille d’or, une d’argent et deux de bronze lors des finales régionales Asie-Pacifique », précise le chef Christophe Megel.

Des défis…

Le Français, originaire du pays de Bitche (Moselle) aime relever les défis. C’est ainsi qu’il devient à 28 ans chef exécutif du Ritz-Carlton Millenia à Singapour en 1999. « A l’époque, l’hôtel comptait plus de 600 chambres, 7 restaurants et était déjà le plus grand Ritz du monde », explique-t-il avant d’ajouter que les mauvaises langues du pays se demandaient combien de temps ce jeune Français allait tenir. Mais ses proches disent de lui qu’il est « invincible », « triomphant » et « visionnaire ». Christophe Megel est l’un des premiers chefs à avoir introduit le concept du brunch luxueux « avec homards, huîtres et champagne » à Singapour. Au Ritz, le succès est immédiat. « On a du organiser deux services afin de servir près de 500 couverts », se souvient-il.

…à Singapour comme ailleurs…

Avant de s’installer à Singapour, Christophe Megel cuisine dans les plus grands restaurants du monde. C’est d’abord au Louis XV de Monte-Carlo qu’il apprend le métier, formé pendant cinq ans par Alain Ducasse, chef aux multiples étoiles et devenu aujourd’hui un ami. Puis il s’envole pour New-York rejoindre l’équipe du Cirque, «  un des meilleurs restaurants d’Amérique du Nord », précise le Français. Là, il rencontre le patron de Samsung qui lui propose de le suivre à Séoul. Christophe Megel collabore alors avec le chef étoilé Alain Senderens qu’il représente en Corée du Sud. Le Mosellan ne quittera plus l’Asie. Issu d’une famille de restaurateurs à Reyersviller, il reçoit en 1996 le prix du meilleur jeune chef d’Asie à 26 ans. Il devient ensuite sous-chef exécutif du Ritz-Carlton d’Osaka au Japon avant de s’établir dans la Cité-Etat qu’il considère désormais comme « chez lui ». Sa femme est d’ailleurs d’origine peranakan (descendants des premiers immigrés chinois installés dans la région).

Et toujours plus de défis…

Toujours à la recherche de nouveaux challenges, Christophe Megel se lance dans l’édition et publie en 2004 des recettes  de cuisine « Asian Tapas : small bytes big flavors ». Dix ans après, « le livre en est à sa 6ème réédition, a été traduit en sept langues et vendu à environ 150.000 exemplaires », précise le chef.

En 2005, il s’essaie à l’enseignement et développe l’école de cuisine « At-sunrice » basée sur un système d’apprentissage à la française qui forme plus de 2.000 élèves aux diplômes d’état singapouriens. L’année dernière, Christophe Megel quitte cette « académie de chefs » pour « se réinventer dans le mécénat », dit-il. Il veut aider de jeunes entrepreneurs à se développer dans les métiers de la bouche. C’est ainsi par exemple qu’il conseille l’équipe du Bar-Roque Grill à l’hôtel Amara.

Dans son portefeuille, les cartes de visite sont aussi nombreuses que ses idées de projets. Le Français ouvre le 11 décembre une boulangerie » Do-main Bakery » au 226 Tanjong Katong road et envisage également de monter  une charcuterie. « Je ne m’arrête jamais », précise-t-il même s’il aime à dire qu’« il ne travaille plus ». Sans doute parce que aujourd’hui, le chef Megel ne cuisine plus que pour se faire plaisir.

Le violoniste français Renaud Capuçon en concert à l'Esplanade Concert Hall.

Le violoniste français Renaud Capuçon en concert à l’Esplanade Concert Hall.

Le violoniste français joue ce samedi sur la scène de l’Esplanade Concert Hall, avec le Singapore Symphony Orchestra. Sous la direction de Lan Shui, il doit interpréter le concerto pour violon No.3 en G majeur de Mozart.

Depuis cinq ans environ, Renaud Capuçon est invité chaque année à manier son archet dans la prestigieuse salle de concert de Singapour. Le musicien serait presque devenu un habitué de ce lieu qu’il affectionne.

« J’ai créé avec cet orchestre une sorte de complicité que je retrouve chaque année et même si nous ne nous voyons que deux jours, une fois par an, j’ai l’impression que l’on s’est quitté la veille », raconte le soliste pour qui « faire de la musique avec le Singapore Symphony Orchestra devient quelque chose de naturel ». Une certaine connivence semble même s’être installée entre le Français et le chef d’orchestre, qui plaisantent tous deux volontiers lors des répétitions pourtant menées à la baguette.

Dirigé par Lan Shui depuis 1997, le Singapore Symphony Orchestra composé de 96 membres a acquis une certaine reconnaissance internationale et cherche justement à créer « un pont entre les traditions musicales d’Asie et de l’Ouest ». L’affiche de ce soir en est donc la parfaite illustration.

Pour Renaud Capuçon, « Singapour est aujourd’hui devenue une place forte en Asie pour la musique classique, avec une magnifique programmation ».

Le public singapourien est « un public de connaisseurs très fidèles qui apprécient que les Européens viennent à eux », précise le violoniste qui dédicace des centaines de disques lors de chaque concert donné dans la Cité-état.

Methode de Singapour

Jean-Michel Jamet est professeur des écoles au CP et CE1 en Bretagne. Depuis 5 ans, il enseigne les mathématiques en utilisant la méthode de Singapour. 

En quoi consiste la méthode de Singapour ?

La méthode de Singapour aborde chaque notion mathématique en suivant trois étapes. D’abord l’étape concrète grâce à laquelle l’élève va rapidement se faire une idée de la notion abordée à l’aide d’objets concrets, manipulés et de mises en situation. Vient ensuite l’étape de la représentation imagée qui est une étape intermédiaire propre à cette méthode et qui permet à l’élève de représenter visuellement la notion travaillée à l’écrit, au tableau par exemple. La dernière étape est dite abstraite et introduit enfin les chiffres et les symboles mathématiques. La grande force de cette méthode est sa progressivité. L’élève avance pas à pas et travaille longtemps la même notion, ce qui donne aux enfants en difficultés plus de chance d’assimiler la leçon.

La méthode de Singapour s’appelle aussi la méthode par modélisation car elle consiste à résoudre les problèmes à l’aide de barres dessinées pour symboliser les quantités connues et inconnues de l’énoncé. C’est une méthode efficace pour résoudre la quasi-totalité des problèmes du primaire et du collège. Elle permet à l’élève de prendre le temps de comprendre le problème avant de s’empresser à le calculer.

Pourquoi est-elle née à Singapour ?

Dans les années 1975, des évaluations internationales ont révélé que 25% des élèves singapouriens n’avaient pas acquis les compétences de base en mathématiques. A titre indicatif, 30% des élèves en France n’ont pas acquis ces mêmes compétences en 2013. Le gouvernement singapourien s’est donc fixé comme objectif de relever le niveau. Au sein du ministère de l’Education nationale, un groupe de didacticiens (pédagogues spécialisés dans une discipline, en l’occurrence les mathématiques, ndlr) en partenariat avec des établissements scolaires et des conseillers pédagogiques, a donc mis au point cette méthode dans les années 1990. L’idée était pour eux de créer des outils très performants capables d’améliorer rapidement le niveau des élèves en mathématiques. Entre 1990 et 2003, Singapour arrive en tête trois fois de suite des évaluations internationales dans des domaines aussi difficiles que les fractions, le calcul et la résolution de problèmes. On a donc pu vérifier l’efficacité de cette méthode. Dès 2003, un comité international s’est intéressé à cette démarche qui s’est ensuite exportée essentiellement en Asie, aujourd’hui en tête des classements, et aux Etats-Unis.

Au vu de ses bons résultats, pour quelles raisons la méthode de Singapour n’est-elle pas davantage enseignée en France ?

Environ 1000 classes en France utilisent la méthode de Singapour pour l’apprentissage des mathématiques. Nous sommes en France dans un système éducatif très francophone, qui se méfie de ce qui vient de l’étranger et surtout de ce qui vient des Anglo-saxons.

La méthode de Singapour, bien que traduite en français, n’est pas en adéquation avec nos programmes scolaires. Par exemple, les Singapouriens apprennent dans le même temps l’addition et la soustraction car ces opérations sont complémentaires. Mais pour les Français, celles-ci sont enseignées séparément. En Asie, les élèves ont aussi plus d’heures de mathématiques par semaine.

D’autre part, certains inspecteurs d’académie peuvent ne pas apprécier le fait que les enseignants, en choisissant d’appliquer la méthode de Singapour -comme ils sont libres de le faire depuis 2005- n’exécutent pas l’intégralité du programme de mathématiques prévu. Car, en effet, la méthode de Singapour est pauvre et basique en matière de géométrie et nécessite une remédiation pédagogique pour les professeurs en France. La France cultive l’excellence en matière de tracé. Dans la méthode de Singapour, il n’est pas exigé qu’un élève de 7 ans sache tracer un rectangle, un carré ou un triangle rectangle alors qu’au même âge, un élève français sait déjà se servir d’une règle et d’une équerre.

Adopter cet outil suppose enfin tout un travail d’équipe entre les enseignants de niveaux différents afin qu’il y ait un suivi dans la méthode. Il est donc préférable que ce soit toute l’école qui décide d’appliquer la méthode de Singapour et non un seul enseignant isolé.